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Le Père Goriot: Le discours de Vautrin

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Le Père Goriot: Le discours de Vautrin Empty Le Père Goriot: Le discours de Vautrin

Message  Admin Sam 17 Mai - 9:43

COMMENTAIRE COMPOSE

DISCOURS DE VAUTRIN A RASTIGNAC (extrait)
("Le baron de Rastignac veut-il être avocat ?...La corruption est en force, le talent est rare.")

Introduction
1) Thème du roman d'apprentissage : Candide, le Père Goriot...
2) Pb : Quelle est la teneur de la leçon donnée par Vautrin ?


I° Partie : Vautrin se comporte comme un "maître" vis-à-vis d'un élève.

1° § Balzac place dans la bouche de Vautrin un véritable cours magistral.

1èIA Nous écoutons une "tirade" où le maître fait à la fois les demandes et les réponses. Il multiplie les questions : grand nombre de phrases interrogatives mais contrairement à la maïeutique socratique, l'élève se tait. Vautrin devance, anticipe les réactions de Rastignac. Ex : litote de la l.7-8 "Tout ça n'est pas gai !" Il ponctue son discours d'exclamations de dégoût ou de satisfaction : l.6 "Bah !" ; l. 13 "Pouah !"... l.21 "Bravo !"

2è IA Ce style oral, familier vise à amadouer et à convaincre le jeune étudiant : Vautrin explique comme un pédagogue en multipliant les images pour mieux se faire comprendre, tantôt sous forme de comparaison : l.71 "comme les araignées dans un pot", tantôt sous forme de métaphore : l.3 "balayer le palais avec sa langue."Cela convainc plus facilement qu'un raisonnement abstrait.

3èIA Ce "maître" s'impose à l'élève et lui impose ses vues ou, pour le moins, son analyse de la situation.Vautrin a décidé de s'intéresser au "jeune homme". Il s'identifie lui même à lui dans le feu de la conversation : le jeu des pronoms est à cet égard significatif : il emploie le "nous" au lieu de "vous". l.8+10 "Nous avons une ressource dans la dot d'une femme" ; "que deviennent nos sentiments d'honneur, notre noblesse ?" "vous êtes allé chez notre cousin Beauséant..." Cela traduit un ton protecteur, mais cette association paraît curieuse... En outre, bien que la situation de Rastignac ne le concerne pas a priori, Vautrin s'implique en employant la 1ère personne du singulier. l.4 : ..."Je ne dirais pas non." ; l. 6-7 : "plutôt que de m'amoindrir l'âme, j'aimerais mieux..." Or, Rastignac ne lui a rien demandé !


2° § Si Vautrin a cette attitude, c'est qu'il a su percer à jour le jeune ambitieux sans expérience qu'est Rastignac.

1èIA Le "maître" manifeste vis-à-vis de son disciple une grande lucidité, une étonnante perspicacité.
- Il a reconnu en Rastignac un jeune noble de province, "baron" sans fortune venant d'une région, qu'il semble bien connaître où "l'on trouve plus de châtaignes que de pièces de cent sous"(l.24) i.e. de 5 francs. Donc une région rurale à l'économie rudimentaire et où les "seigneurs" ont peu de revenus.
- Il a compris que Rastignac, sortant de la pension Vauquer, a été fasciné par le "luxe" des salons parisiens.
- Il a deviné en lui l'être d'instinct, "l'animal" qui a "flairé" cette richesse (l.18-19) et qui, pas plus qu'un chien n'est prêt à lâcher "l'os" qu'il a entre les mains.
- Il a perçu enfin les limites de ce "jeune homme" incapable de dissimuler et qui se promène avec toute sa nouvelle ambition marquée "d'un mot" sur son "front" (l.20) ; incapable aussi, sans doute, d'être un "génie". (le talent est si "rare") "acharné au combat".

2è IA Ajoutons que Vautrin est, curieusement, bien renseigné sur son protégé :
- Il connaît les visites de Rastignac. l.17-18 : répétitions, parallélisme, passés-composés "Vous êtes allé... vous êtes allé..."
- et la démarche auprès de sa famille : l.22 "Vous avez saigné vos soeurs"

II ° partie
Transition : Cet exposé de Vautrin constitue une véritable démonstration dans laquelle le maître utilise toutes les ressources de l'art de convaincre.

1° § Vautrin passe d'abord en revue les différents moyens de "parvenir"

1è IA Le métier d' "avocat" (l.1) et/ou le "travail" (l.25) ? Il emploie la 3è personne du singulier ("Le baron veut-il...") et fait ainsi mine de prendre le recul d'un observateur objectif. Mais c'est pour mieux mettre en évidence la difficulté de l'entreprise.
- antithèse entre l'exclamation flatteuse "oh ! joli !" (l.1) et la nécessité tout de suite affirmée et soulignée par une asyndète : "Il faut pâtir." La peine à endurer et à prévoir est accentuée par des allitérations en /p/ et /t/ ("pâtir pendant ... dépenser par mois")
- et le maître insiste en accumulant les actions à envisager dans une longue phrase. L'occlusive /b/ renforce l'aspect dépréciatif de cette énumération : "bibliothèque... cabinet... baiser... balayer"
- l'emploi de deux métaphores avilissantes, surtout, ne donne guère envie de suivre cette voie où il "faudrait" -"baiser la robe d'un avoué" pour avoir du travail (des "causes") l.3 - "balayer le palais avec sa langue." On imagine alors les humiliations du jeune avocat obligé de ravaler son art de la parole à de basses besognes, à toutes les compromissions.

2è IA Mais "s'amoindrir" ainsi ne produirait d'ailleurs que peu de résultats : la rareté des réussites sociales dans cette carrière d'avocat est malicieusement soulignée par le jeu lexical sur les nombres (l.5-6) tous multiples de cinq : "cinq avocat...à cinquante ans...plus de cinquante mille francs..."

3è IA La perspective de la fin de carrière n'est guère plus réjouissante : Tout ce que promet Vautrin c'est de finir dans une pension minable comme celle que connaît actuellement le jeune étudiant chez "Maman Vauquer" (l.27) Il se retrouverait donc au point de départ... A cette différence qu'il serait devenu desséché comme une "mécanique" à l'instar de Poiret. (ironie de "la force" du bonhomme) Et l'emploi de l'indicatif présent à la ligne 26 ("le travail...donne...") ne laisse planer aucun doute sur cette issue.

2° § Le mariage de raison n'offre guère de perspective plus réjouissante.

1è IA Ce serait, selon le maître, un véritable suicide, idée assénée par l'image de la "pierre au cou" l.9 encore plus repoussante que le stéréotype "se mettre la corde au cou".

2è IA Ce serait en tout cas la "mort" de son bonheur, car il y aurait incompatibilité entre le sens de"l'honneur" du jeune "baron" (l.10) et un tel mariage... pour raisons financières, et ce serait tomber bien bas que de partager le "malheur" des "pierres d'égout" (l.14) qui ne voient passer que les ordures de l'existence, et plus rien de "noble" (l.10) ni de pur.

3è IA Sans compter que cette inefficacité dans la recherche du "bonheur" serait la conséquence d'un avilissement : il faudrait ramper "comme un serpent" aux pieds de la femme. (prête à lui écraser la tête si on reprend l'image biblique. ?) Il faudrait s'abaisser encore, "se coucher" et "lécher", deux actions "amoindrissantes" soulignées par l'allitération de la chuintante / /

3° § Mais ces deux hypothèses sont à rejeter l'une comme l'autre.

1è IA Ce dilemme enferme Rastignac dans une impasse marquée par la reprise en parallèle des lignes 7 et 15 : "J'aimerais mieux me faire corsaire", "vaut encore mieux guerroyer avec les hommes." Les deux hypothèses des lignes 4 et13 exprimant un potentiel ("si", un jour, "ce métier vous menait à bien..." imparfait) sont suivies respectivement, dès la phrase suivante, d'un impératif ("trouvez-moi") à la ligne 5, qui lance un véritable défi, et d'un indicatif futur ("vous serez") à la ligne 14, qui présente l'avenir de manière inéluctable. De plus, dans un cas comme dans l'autre, la conjonction d'opposition "mais" renforce l'irréalité du rêve, l'inefficacité de la "jolie" entreprise.
2è IA La conclusion s'impose donc :
"Autant commencer" tout de suite à se "révolter" contre les conventions humaines" (l.11) D'ailleurs, l'état actuel de Rastignac est trop instable pour lui dicter une conduite
- Il est trop "noble", ce jeune "baron", pour "s'amoindrir", s'humilier comme une "truie" (l.13) ou pire encore, pour envisager la solution de la "dot" ; pour accepter de vivre chez "maman Vauquer" (l.27)
- Et, d'un autre côté, pas assez "noble" pour n'avoir pas "floué" ses soeurs (l.22)... Mais cette vilenie est traitée au passage par le "maître" d'inefficace : cet expédient sera vite épuisé (l.25) image des "soldats à la maraude" (= idée de rapidité), d'excusable : le présent de vérité générale ("Tous les frères flouent") ainsi que la généralisation obtenue par le pronom "tous", présente l'opération comme fréquente, dans l'ordre des choses... "Papa" Vautrin excuse l'hôte de "maman Vauquer" ! tout en lui rappelant qu'il a déjà été capable de quelque action pas très nette, voire d'une certaine "corruption".

3è IA Voilà de quoi jeter le trouble dans l'esprit d'un "jeune homme" qui est au "carrefour" de sa vie (l.16) : il a "déjà choisi" (l. 17) la direction ; reste à choisir les moyens d'y "parvenir" ; mais de toute manière le choix s'impose ; le présentatif de la ligne 16, "voilà", le verbe impersonnel de la ligne 31, "il faut", les impératifs des lignes 17 et 30, "choisissez"..."jugez" mettent Rastignac en demeure de trancher.

4è IA Or, celui-ci est prêt à payer n'importe quel "prix" (l.20) pour "parvenir" rapidement ("rapide fortune", l.28) en tout cas, c'est le commentaire ...ajouté par Vautrin : il y a en effet une différence typographique entre "le" "mot" marqué sur son front ("parvenir" est écrit en lettres italiques) et l'expression "parvenir à tout prix", ajoutée donc par le démon tentateur. Rastignac est ainsi enfermé dans un raisonnement progressif qui ne livrera sa solution qu'à la fin du discours.

IIIè Partie
Transition : Après avoir écarté habilement deux solutions d'ascension sociale plus ou moins honnêtes, en tout cas présentées comme habituelles et conformes aux "conventions humaines", le maître essaye de convaincre son élève d'envisager deux solutions plus ..."marginales", le "génie" et la "corruption"

1° § La solution de Vautrin repose sur une analyse de la société particulièrement pessimiste

1è IA Il s'agit d'une société où l'argent est roi ("dépenser mille francs par mois") et où l'argent est moins une chose que l'on "gagne" (l.5) qu'une chose que l'on "prend" (l.7) + (l.22) + (l.36)

2è IA Cette société est particulièrement élitiste : il n'y a pas de place pour tout le monde au soleil de la réussite. Face aux 50 000 jeunes arrivistes, Rastignac n'est qu' "une unité" (insistance) (l.29). Comique de l'emploi d'un terme juridique : "attendu que..." l.32. Société où les meilleurs "prennent sans partager" (l.36)

3è IA Une société constituée de dominants et de dominés : il y a ceux qui "plient" et ceux qui sont "pliés" (l.37), ceux qui sont au-dessus et ceux qui sont au-dessous. Cette impression de hiérarchie verticale est renforcée par les images "horizontales". Pour être avocat ou se marier richement, il faut ramper : "baiser la robe", "balayer", "s'amoindrir", "se coucher", "lécher les pieds", "faire des bassesses", et se retrouver comme une "pierre d'égout". Cf aussi la rime intérieure en /u/ : "adore à genoux", "enterrer sous la boue" l. 36-37.




4è IA Vautrin décrit surtout cette société comme une véritable jungle, un monde où c'est à celui qui "mangera" l'autre (l.31) L'image de mort "des araignées dans un pot symbolise de manière horrible cette vision de la société. "ici" (l.33), tous les coups sont permis : couvrir de la "boue" (l.38) de la "calomnie" (l.36), "enterrer" le génie naissant (l.37)

2° § Dans une telle société, il n'y aurait donc qu'une seule solution pour "faire son chemin" (l.33)

1è IA Rastignac se retrouve devant une alternative, la reprise de la structure binaire renforçant l'effet persuasif :
-ou bien il "parvient" par l'"éclat du génie" (l.33), mais celui-ci est ..."rare", et il lui faudrait de toute manière "entrer...comme un boulet de canon", autre image de mort qui laisse penser que même le "talent" ne permet pas de "parvenir" sans écraser les autres.
- ou bien il parvient par "l'adresse de la corruption" (l.33), "corruption" annoblie par l'alliance de mots, mais là encore il faudra "se glisser comme une peste", autre image de mort, et donc tuer autour de soi.

2è IA La réponse est contenue dans l'aphorisme dont la concision est mise en valeur par les deux longues phrases qui l'entourent : "L'honnêteté ne sert à rien". Ainsi, la "corruption" est la seule solution efficace pour "notre" jeune homme. Et c'est d'ailleurs la plus employée : elle est "en force", précise la dernière ligne du passage. (idée renforcée par l'asyndète et le parallèle de la construction grammaticale : "la corruption est en force, le talent est rare". Il convient de lutter à armes égales : employer la ruse de la "peste qui se glisse" (l.34) contre la ruse de la "calomnie" et de la "boue" mortelle (l.38). Donc, le "prix" à payer pour "parvenir", c'est d'accepter la "corruption". Et si le "génie" est par définition inné, la "corruption" peut s'apprendre, d'où les offres de service de Vautrin comme maître-ès-société, ou ès-corruption.

3° § Mais la leçon est claire, il faudra, de toute manière, se battre pour arriver à une situation enviable.

Le thème des "efforts" et du "combat" (l.30-31) était déjà présent au début du texte avec les images du "corsaire" (l.7) et de la guerre ("guerroyer avec les hommes" l.15) Et dans cette société, c'est le plus fort qui gagne (Cf La Fontaine) Alors, tant qu'à faire, "mieux vaut" ne pas se tromper d'adversaire : se battre "contre les hommes" plutôt que contre "sa femme", ni d'arme : soyons plutôt "corsaire", cela est plus efficace... et moins rébarbatif. De même, il est préférable de ne pas attaquer de front : utilisont plutôt l' "adresse de la corruption".


Conclusion :

Leçon d'un grand cynisme, à laquelle Rastignac saura résister...dans un premier temps. Lucien de Rubempré, lui, ne résistera pas. Il en mourra.

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